⏱L'essentiel en quelques mots
Face à une situation de harcèlement au travail, la démission apparaît souvent comme l’unique solution. Pourtant, d’autres solutions existent. Droits, recours, sanctions… On fait le point sur tout ce que vous devez savoir sur la démission pour harcèlement :
- le harcèlement dans un cadre professionnel se caractérise par une dégradation des conditions de travail et de la santé de la victime ;
- il peut prendre différentes formes (humiliations, insultes, menaces physiques, etc.) ;
- l’employeur est dans l’obligation légale de sensibiliser ses salariés sur la thématique du harcèlement moral et d’intervenir le cas échéant ;
- avant la démission, plusieurs recours sont envisageables pour la victime (médiation, intervention du CSE, saisie de la médecine du travail, etc.) ;
- des solutions alternatives à la démission existent (rupture conventionnelle et prise d’acte notamment) ;
- le harcèlement moral est un motif suffisant pour ouvrir le droit au chômage à la victime, malgré sa démission ;
- il est nécessaire de déposer plainte pour percevoir le chômage après démission pour harcèlement.
Sommaire
Qu'est-ce que le harcèlement au travail ?
Le harcèlement au travail désigne les actes répétés de violence verbale, physique ou psychologique. Ces attaques peuvent prendre des formes diverses comme :
- des insultes ;
- des menaces physiques ;
- des coups portés ;
- des humiliations ;
- la propagation de rumeurs ;
- la fixation d’objectifs irréalistes ;
- la placardisation ;
- la réalisation de tâches dégradantes ;
- etc.
À l’image de toutes formes de harcèlement, celui subi au travail peut avoir de graves conséquences sur les victimes. Perte de confiance en soi, stress et anxiété sont des symptômes courants chez les salariés qui doivent y faire face.
En outre, le harcèlement dans le cadre de l’activité professionnelle induit une dégradation nette des conditions de travail pour la personne concernée. Cela s’accompagne généralement d’une altération de la santé physique et morale de la victime.
Bon à savoir
Une étude menée par la Dares (direction de l'animation de la recherche, des études et des statistiques) stipule qu’au cours de l’année 2021, environ 26 % des salariés français ont déclaré avoir été victimes de conflit et de harcèlement sur leur lieu de travail.
Comment le reconnaître ?
Il est difficile de reconnaître des actes de harcèlement au travail. Tout d’abord, les faits se produisent bien souvent à l’abri des regards, pour se prémunir de témoins potentiels. Par ailleurs, il n’est pas rare que certains salariés n’aient même pas conscience d’assister ou de participer à des faits de harcèlement.
Pour aider à reconnaître le harcèlement au travail, le site du service public présente trois critères qui caractérisent l’infraction :
- une atteinte aux droits et à la dignité de la victime ;
- l’altération de la santé physique ou mentale ;
- une menace pour l’évolution professionnelle.
Quelles sont les obligations de l'employeur face au harcèlement ?
En premier lieu, l’employeur doit mettre en place des actions préventives en matière de harcèlement au travail. Ainsi, chaque employé doit être informé lors de son arrivée dans l’entreprise des règles en vigueur ainsi que des conséquences et des sanctions envisagées en cas d’infraction.
Régulièrement, des actions de sensibilisation et de formation au harcèlement moral sont également à organiser par l’employeur. Pour ce faire, il peut notamment se rapprocher du CSE (comité social et économique), des représentants du personnel ou encore de la médecine du travail.
Bien entendu, l’employeur est également tenu de sanctionner les auteurs coupables de harcèlement au travail. Il lui incombe de mener une enquête afin de statuer sur la véracité des actes qui lui ont été rapportés et punir le salarié mis en cause le cas échéant.
Bon à savoir
Vous pouvez vous retourner contre votre employeur et demander des dommages et intérêts si aucune mesure n’est prise à l’encontre du salarié coupable de harcèlement.
Quelles sanctions pour le salarié coupable de harcèlement ?
Le salarié coupable de harcèlement s’expose à la fois à des sanctions professionnelles et judiciaires.
D’un point de vue professionnel, il peut être contraint à la mutation, faire face à une mise à pied temporaire ou plus largement être licencié.
D’un point de vue juridique, notez que le harcèlement moral peut conduire à 30 000 € d’amende et deux ans de prison. Des frais supplémentaires liés au versement de dommages et intérêts peuvent s’ajouter à ces sanctions.
Comment agir légalement face au harcèlement avant de démissionner ?
Poser une démission pour harcèlement est pour certains employés la seule solution pour retrouver leur tranquillité d’esprit. Mais avant d’en arriver à cette décision, sachez que vous disposez de recours concrets pour agir légalement et tenter de mettre un terme définitif à cette situation inconfortable.
Que vous soyez victime ou témoin de harcèlement au travail, le premier bon réflexe à adopter est d’en informer votre hiérarchie ou des membres qualifiés au sein de l’entreprise. Ainsi, vous pouvez notamment vous rapprocher :
- du CSE de l’entreprise ;
- des délégués du personnel ;
- des ressources humaines ;
- de vos supérieurs hiérarchiques.
Pour tenter de résoudre le problème à la source, certaines entreprises font le choix de faire appel à un médiateur. Si les deux parties concernées approuvent ce recours, une solution à l’amiable peut être envisagée (ex : l’entreprise s’engage à muter l’auteur de harcèlement ou à le changer de poste pour qu’il ne croise plus sa victime).
Dans le cas où aucune de ces solutions ne s’avère viable et que les faits persistent, d’autres recours sont possibles.
En premier lieu, vous pouvez par exemple faire appel à l’inspection du travail pour faire constater les faits de harcèlement dont vous êtes témoin ou victime. Si ces derniers sont avérés, l’inspecteur chargé du contrôle est dans l’obligation de les faire remonter auprès du procureur de la République.
Enfin, notez que vous pouvez déposer plainte devant la justice pénale ou saisir le conseil des prud’hommes pour dénoncer des faits de harcèlement au travail. Dans cette optique, assurez-vous de rassembler un maximum de preuves justifiant votre dénonciation (ex : e-mails injurieux, témoignages de collègues, certificat médical, etc.). Si les faits sont avérés, vous pouvez bénéficier de ce que l’on appelle une résiliation judiciaire du contrat de travail. Cette dernière permet de requalifier votre souhait de démission en un licenciement sans cause réelle et sérieuse, aboutissant à la perception d’indemnités compensatrices, en plus de la rupture du contrat de travail.
Bon à savoir
Vous avez la possibilité de saisir le Défenseur des droits si vous estimez que le harcèlement moral dont vous êtes victime est motivé par une volonté discriminatoire.
Quels sont les droits au chômage après une démission pour harcèlement ?
En théorie, toucher le chômage après une démission n’est pas envisageable. En effet, contrairement à un licenciement, une démission n’est pas considérée comme une perte involontaire d’emploi.
Néanmoins, une démission pour motif de harcèlement au travail fait figure de cas exceptionnel, pouvant donner droit à l’allocation d’aide au retour à l’emploi (ARE), au même titre que :
- l’arrêt du versement du salaire par l’employeur ;
- une démission pour création d’entreprise ;
- un projet de reconversion professionnelle ;
- un déménagement ;
- le départ en service civique ou en volontariat.
Notez que pour percevoir l’ARE après démission pour harcèlement au travail, il est nécessaire d’avoir saisi la justice. En effet, un récépissé du dépôt de plainte effectué doit être joint à la demande d’indemnisation remise auprès de France Travail.
Bien entendu, vous devez également répondre aux critères standards de perception de l’ARE, à savoir :
- résider sur le territoire français ;
- avoir plus de 18 ans ;
- être physiquement apte à la reprise d’une activité professionnelle ;
- justifier d’une recherche active d’un nouvel emploi ;
- être inscrit à France Travail dans les 12 mois suivants l’arrêt de l’activité professionnelle ;
- avoir travaillé au moins 6 mois sur les 24 derniers mois (36 mois si vous avez 53 ans ou plus).
Bon à savoir
Vous pouvez porter plainte dans un délai allant jusqu’à six ans après les faits de violences.
Que faire si France Travail refuse de verser l’ARE ?
Dans le cas où votre demande d’indemnisation après licenciement pour harcèlement est refusée par France Travail, car considérée comme illégitime, sachez que vous devez attendre une période de 121 jours avant le réexamen de votre dossier.
Si ce nouvel examen ouvre bel et bien les droits à la perception de l’ARE, alors vous êtes indemnisé à compter du 122e jour.
Quelles alternatives à la démission existent pour échapper au harcèlement ?
Si vous souhaitez quitter l’entreprise et mettre un terme à votre contrat de travail sans avoir à poser votre démission, sachez que des solutions existent.
Tout d’abord, il faut se pencher sur la prise d’acte. Il s’agit d’une rupture de contrat dite unilatérale, c’est-à-dire exclusivement à l’initiative du salarié. Pour la déclencher, il est nécessaire de se rapprocher du Conseil des prud’hommes et prévenir votre employeur. Par ailleurs, pour que la prise d’acte soit considérée comme recevable, il est impératif de prouver l’attitude fautive de votre employeur (refus de médiation, absence de sanction à l’égard de l’employé auteur de harcèlement, etc.).
Par ailleurs, la rupture conventionnelle fait également figure d’alternative à la démission. Si vous et votre employeur consentez à cette rupture à l’amiable, alors vous bénéficiez de l’ouverture de vos droits à l’ARE.
Toutefois, la rupture conventionnelle peut - dans certains cas - être forcée par l’employeur pour éviter des sanctions ou toutes formes d’indemnisation. Si c’est le cas, vous avez la possibilité de saisir la justice pour faire valoir vos droits. Or, la rupture conventionnelle est jugée forcée, celle-ci est requalifiée en licenciement sans cause réelle et sérieuse, vous donnant accès à diverses indemnités.