Sofica : fonctionnement, investissement et réduction d'impôt

Mécanisme d’optimisation fiscale relativement confidentiel, l'investissement dans des œuvres cinématographiques et audiovisuelles ouvre droit à une réduction d’impôt intéressante pour le contribuable. Si la souscription à des parts de Sofica vous permet de défiscaliser vos placements, elle n’est toutefois pas sans risque et doit être mûrement réfléchie compte tenu des possibilités de perte en capital. En quoi consiste l’investissement en Sofica ? Quel avantage fiscal espérer pour un contribuable ? Quels sont les rendements constatés sur ce produit financier ? Est-ce en définitive un placement réellement pertinent ?
Sofica : fonctionnement, investissement et réduction d’impôt. Voici tous nos conseils pour effectuer votre choix en toute connaissance de cause.

Sofica : qu’est-ce que c’est ? 

Créé par la loi du 11 juillet 1985, le dispositif des Sociétés de financement de l’industrie cinématographique et de l’audiovisuel (Sofica) a été initié par les pouvoirs publics afin de soutenir la production cinématographique et audiovisuelle par des investissements privés.

Le principe des SOFICA

Mises en place pour une durée maximale de dix ans, les Sofica peuvent être créées soit par des professionnels agréés du monde du cinéma et de l’audiovisuel, soit par des établissements bancaires et financiers. Ces structures ont alors pour mission de collecter des fonds en sollicitant des investisseurs privés et des particuliers. Elles agissent comme intermédiaires qui vont ensuite utiliser les fonds récoltés pour les investir dans des productions audiovisuelles et cinématographiques susceptibles de produire des revenus dans le futur dont l’investisseur bénéficiera à proportion de sa quote-part.

Un agrément nécessaire pour la constitution de SOFICA

La création d’une Sofica nécessite l’obtention d’un agrément préalable après une étude de dossier menée conjointement par le Centre National du Cinéma (CNC) et la Direction Générale des Finances Publiques. Ces deux organismes analysent alors les dossiers au regard de différents critères dont notamment les performances des investissements passés ou encore les engagements pris pour la collecte. Un particulier peut également solliciter la création d’une Sofica à la condition que son activité professionnelle soit en rapport avec le cinéma ou le monde audiovisuel. 

La commercialisation et la collecte de fonds

Après avoir accordé l’agrément, le ministère du Budget détermine le montant de la collecte maximum pouvant être effectuée par la Sofica en concertation avec le CNC.
L’AMF (Autorité des Marchés Financiers) entérine finalement la création de la structure en donnant son aval pour le début de la commercialisation auprès du grand public. Les demandes d’agrément doivent être effectuées au plus tard au début de l’été pour une collecte concentrée sur les derniers mois de l’année.

Une liste de Sofica agréées est publiée chaque année par le CNC généralement au mois d’octobre. Les potentiels investisseurs peuvent alors y souscrire jusqu’au mois de décembre. 

Les Sofica connaissent un certain succès ces dernières années, en témoigne notamment une hausse des récoltes de fonds sur l’année 2021 (+ 11 millions d’euros par rapport à 2020) avec 71 millions d’euros récoltés au titre du dernier exercice pour la création indépendante utilisables en 2022. De nombreux films à succès (notamment à l’export) et plébiscités par différents jurys de cérémonie (Oscars, Césars, Festival de Cannes, Mostra de Venise) ont en partie été réalisés avec des aides provenant d’investissements en SOFICA (Titane, Antoinette dans les Cévennes, Josep, La Bonne Épouse ou L'Événement pour les plus récents).

Comment investir dans une SOFICA ?

Pour pouvoir bénéficier de la réduction d’impôt, plusieurs critères doivent être respectés par les contribuables :

• un investissement minimal exigé de 5 000 euros qui peut même être supérieur pour certaines SOFICA ;
• l’investissement doit concerner, sauf exception, des productions en langue française agréées par le ministère de la Culture. Une part de l'investissement (20 %) peut toutefois être utilisée pour investir dans la coproduction d’une œuvre dans la langue du coproducteur, si celui-ci est majoritaire et est issu d’un pays de l’Union Européenne ;
• l’investisseur doit être domicilié fiscalement en France ;
• la durée de détention minimale des parts est de cinq années sauf cas de retrait anticipé exceptionnel (décès de l’époux ou du partenaire de PACS) ;
• au moins la moitié des fonds collectés doivent servir à la réalisation de productions indépendantes de la capitalisation de la SOFICA ;
• l’enveloppe collectée par les SOFICA doit être utilisée à hauteur d’au moins 90 % dans les douze mois suivant l’immatriculation de la société au RCS. Les 10 % restants peuvent être placés sur un compte rémunéré pour servir aux dépenses courantes de fonctionnement de la société et pour parer à l’éventualité de dépenses supplémentaires non-budgétées.

La niche fiscale, régulièrement reconduite, a pour le moment été officiellement prolongée jusqu’au 31 décembre 2023. Le plafond d’investissement maximum en Sofica est quant à lui révisé chaque année par le ministère de l’Economie et des Finances.

Comment fonctionnent les Sofica ? 

La constitution d’une Sofica passe par différentes étapes à commencer par l’obtention de l’agrément des pouvoirs publics. Par la suite, les modalités d’investissement et de répartition sont alors à déterminer. 

La collecte de fonds et la rétribution des investisseurs

Un fois l’agrément obtenu, la Sofica peut alors démarrer la collecte de souscriptions du mois septembre jusqu’au mois de décembre. Les candidats à la souscription doivent alors apporter un montant minimal de 5 000 euros (ce montant peut être plus élevé selon les SOFICA) et se positionner le plus rapidement possible sur les productions potentiellement les plus rentables. 

Les investisseurs bénéficient alors de droits aux recettes sur l’exploitation des œuvres proportionnellement à leur contribution à l’investissement. Celles-ci sont le fruit des accords passés par la société avec les différentes productions. Les revenus peuvent alors être de différentes natures et provenir en premier lieu des salles de cinéma et de la télévision mais également des supports VOD, des ventes physiques ou de tout autre support numérique.

Les conditions d’exploitation pour l’investisseur

Au moment de la souscription, des droits d’entrée peuvent être réclamés à l’investisseur même s’ils sont généralement peu élevés et négociables. Des frais de gestion sont également applicables et facturés annuellement. Ils varient de 1,5 à 2 % par an.
Une fois acquises, les parts de SOFICA doivent être conservées pendant au moins cinq années et assez fréquemment huit années selon les SOFICA (la durée de l’investissement ne peut toutefois excéder dix ans). Ils ne peuvent alors pas retirer les fonds sauf en cas de décès de l’époux ou du partenaire de PACS. Tout retrait avant la période de conservation obligatoire  remet en cause l’avantage obtenu et entraîne un redressement fiscal.
Au terme du délai de détention, l’investisseur récupère son capital à proportion des résultats réalisés par les œuvres sélectionnées. Aucun frais supplémentaire n’est en revanche appliqué sur la sortie du capital.

Les choix d’investissement et le partage des revenus

Une fois la collecte de souscriptions terminée, la Sofica étudie alors les choix d’investissement possibles avec les fonds obtenus. Des comités d’investissement sont ainsi spécialement créés pour effectuer les meilleurs choix possibles en fonction notamment des scénarios, des réalisateurs, de la distribution des œuvres et notamment de la renommée des acteurs. Les choix peuvent se porter sur n’importe quel type de production audiovisuelle (films grands publics, fictions, séries, films d’animation, documentaires, courts-métrage etc.).

Après cette sélection, un accord tripartite doit être trouvé pour la redistribution des revenus issus des productions. Les négociations sont alors menées entre l’équipe de production, la Sofica et les distributeurs des œuvres. Lorsqu’un accord est trouvé sur le partage des revenus, le tournage peut alors commencer.

Quelle est la réduction d’impôt pour l’investissement dans une Sofica ?

Si l’investissement en Sofica doit avant tout être motivé par une volonté de diversification des actifs, son atout principal réside néanmoins dans l’avantage fiscal procuré par la réduction d’impôt accordée suite à l’investissement. 

L’administration fiscale prévoit trois montants de réduction d’impôt différents selon les choix d’investissement effectués par les contribuables :

• un taux de réduction d’impôt à 30 % du montant de l’investissement dans le cas général ;
• un taux de réduction d’impôt à 36 % du montant de l’investissement lorsque la Sofica sélectionnée investit au moins 10 % des fonds au capital de sociétés de production dès la première année ;
• un taux de réduction d’impôt à 48 % du montant de l’investissement lorsque la Sofica investit au moins 10 % des fonds pour le financement d'œuvres de fiction, de documentaires et d’animations sous forme de séries. Il s’applique également lorsque 10 % des fonds sont utilisés pour l’exportation d'œuvres françaises à l’étranger (achat de droits sur les recettes d’exploitation hors de France).
  Là encore, la société doit également engager 10 % des investissements dès la première année suivant la souscription.

Quel est le plafond de défiscalisation avec les Sofica ?

L’investissement en Sofica présente un avantage spécifique également applicable pour les investissements en Outre-mer puisqu’il n’entre pas dans le plafonnement des niches fiscales à 10 000 euros par an et par foyer fiscal. Un plafond spécifique d’un montant de 8 000 euros a été défini par l’administration pour mutualiser ces investissements (SOFICA + Outre-mer) et les distinguer du plafond générique. Ce plafond distinct vient s’ajouter au plafonnement générique de 10 000 pour un montant total d’investissement éligible à la réduction d’impôt de 18 000 euros.

Les contribuables peuvent ainsi déduire jusqu’à :

• 5 400 euros pour la réduction générique à 30 % (18 000 x 30 %) ;
• 6 480 euros en cas d’investissement de 10 % effectué dès la première année (18 000 x 36 %) ;
• 8 640 euros pour les investissements destinés au développement de séries ou à l’exportation d'œuvres à l’étranger (18 000 x 48 %).

Par ailleurs, une condition supplémentaire s’applique puisque les montants d’investissement éligibles à l’avantage fiscal ne peuvent excéder 25 % du revenu net global annuel.

Exemple

Marie investit 8 000 euros dans une Sofica destinée à l’exportation d'œuvres à l’étranger afin de réduire le montant de son imposition. Son revenu net global sur l’année s’élève à 30 000 euros.
Théoriquement, elle pourrait obtenir une réduction d’impôt égale à 3 840 euros (8 000 x 48 %). Néanmoins, son investissement représente 26,7 % de son revenu net global soit plus que le plafond autorisé de 25 %. Elle ne peut ainsi déduire au maximum que 25 % de son revenu net global soit 7 500 € d’investissement (30 000 x 25 %). Le montant de la réduction d’impôts s’élève alors dans ce cas à 3 600 euros (7 500 x 48 %). 

Pour optimiser son investissement, Marie a donc intérêt à revoir son investissement à la baisse à 7 500 euros. Par ailleurs, elle devra également adapter son investissement au montant de l’impôt qu’elle souhaite effacer. 

Le BOFIP (Bulletin d'Information des Finances Publiques - Impôts) ne fait en effet pas mention de la possibilité de report de l’excédent de réduction d’impôt sur les exercices suivants.
Celui-ci est alors perdu s’il n’est pas utilisé sur l’exercice sauf en cas de versements effectués sur plusieurs années qui peuvent alors être imputés pour chacune des années en question.
L’investissement SOFICA peut donc répondre à une problématique d’effacement de l’impôt suite notamment à des revenus exceptionnels perçus sur une année en particulier.

Sofica : quel rendement peut espérer un investisseur ?

Les rendements escomptés sur des investissements réalisés en Sofica sont relativement modestes et les investisseurs subissent régulièrement des pertes en capital. Cela s’explique notamment par des scores d’audience parfois médiocres pour les productions nationales et un bouleversement technologique tendant à favoriser les nouveaux formats numériques gratuits au détriment des supports audiovisuels et cinématographiques classiques. Seuls certains investisseurs peuvent espérer réaliser une plus-value intéressante sur les films financés connaissant un succès exceptionnel comme il en existe quelques-uns chaque année. En dehors de ce cas de figure, la rentabilité de l’investissement en Sofica s’apprécie surtout au regard de l’avantage fiscal obtenu. En prenant en compte la réduction d’impôt, les investisseurs peuvent ainsi espérer en moyenne un rendement d'environ 4 à 5 %.

Il existe néanmoins différents types de contrats établis par les Sofica qui peuvent conditionner les rendements obtenus par les investisseurs :

• Les contrats de développement dans lesquels la Sofica s’investit dans toutes les étapes précédant la production (acteurs, décors, scénarios, achat de droits). L’investissement est alors remboursé dès la mise en production du film.
• Les contrats d’association à la production qui prévoient des recettes futures sur l’exploitation des œuvres sur un ou plusieurs supports de commercialisation. Ce type de contrat est utilisé pour les productions et films identifiés comme prometteurs par les comités d’investissement. Ils sont donc par définition susceptibles de générer des revenus intéressants pour les investisseurs. Les risques sont en revanche par conséquent plus importants.

Si les risques de non-restitution du capital de départ existent bel et bien, des garanties ont néanmoins été mises en place afin de limiter les risques avec notamment une diversification des investissements. Certains contrats prévoient également une garantie de rachat sur une partie des titres (30 à 40 %) délivrée par des distributeurs et sociétés de productions indépendantes. Cette clause permet à la Sofica de garantir la récupération de son investissement de départ a minima. Les investisseurs peuvent alors investir sereinement et bénéficier de l’avantage fiscal qui leur garantit un rendement net confortable.
S’il ne s’agit pas de la solution la plus rentable potentiellement, c’est certainement la moins risquée pour un contribuable qui souhaiterait optimiser ses finances et participer à la production culturelle nationale sans nécessairement se lancer dans des placements hasardeux.

Quels sont les avantages et les inconvénients d’investir dans une Sofica ?

Les rendements attendus de l’investissement en Sofica peuvent, à première vue, paraître décevants. L’investissement dans ce type de produit financier peut ainsi apparaître comme peu rentable pour un contribuable à la recherche d’une véritable solution de défiscalisation notamment dans un contexte de crise sanitaire qui a fortement impacté le monde culturel. Il s’agit de plus d’un placement de long terme nécessitant des liquidités de départ relativement importantes (au moins 5 000 euros) et qui vont être immobilisés pendant au moins cinq années et au maximum dix. 

Pour autant, l’investissement visant à soutenir l’audiovisuel et le cinéma permet de bénéficier d’un avantage fiscal one shot (à la manière de l’investissement en Girardin industriel) qui se répercute directement sur le montant de l’impôt permettant d’effacer en bonne partie l’imposition sur un exercice fiscal donné. Les plafonds importants offrent la possibilité d’obtenir des montants élevés de réduction, appréciables pour les contribuables fortement imposés ou pour ceux souhaitant minorer l’imposition sur des revenus exceptionnels au cours d’un exercice fiscal particulier (primes, licenciement économique etc.). Ils s’entendent de plus en-dehors du plafonnement global des niches fiscales à 10 000 euros par an. L’investissement Sofica n’a donc pas d’incidence sur d’éventuels choix que vous pourriez avoir à faire entre certains crédits ou réductions d’impôts non-cumulables afin d’optimiser le montant de votre imposition.

Le placement Sofica constitue par ailleurs un outil de diversification supplémentaire d’un patrimoine financier engageant des sommes moins conséquentes que la défiscalisation immobilière avec des implications moins importantes en cas de mauvais choix d’investissement. 

Comment déclarer son investissement Sofica ?

La déclaration d’un investissement en Sofica doit être effectué au niveau de la déclaration de revenus complémentaire 2042 RICI dans l’encadré “Autres réductions et crédits d’impôt”. 

Les montants sont alors à renseigner sur la ligne “Souscription au capital de SOFICA” dans les cases correspondant à votre situation particulière selon le type d’investissement réalisé :

• Case 7FN pour bénéficier de la réduction d’impôt de 30 % ;
• Case 7GN pour bénéficier de la réduction d’impôt de 36 % ;
• Case 7EN pour bénéficier de la réduction d’impôt de 48 %.

En complément, doivent être transmises à l’administration fiscale les preuves d’investissement (décision d’agrément, relevés de titres jusqu’à la cinquième année) permettant au service des impôts de s’assurer que vous en êtes bien l’auteur et que vous pouvez, à ce titre, bénéficier de la réduction d’impôt.